Opinion : Traité sur la Charte de l’énergie : le traité qui va tuer l’Accord de Paris
" Traité sur la Charte de l'énergie : le traité qui va tuer l'Accord de Paris", 8 juin 2022
Le traité sur la Charte de l’énergie est un accord multilatéral de 1994, ratifié par la France en 1999, qui permet aux investisseurs étrangers d’exiger jusqu’à plusieurs milliards d’euros des Etats en compensation de l’impact négatif que les changements dans la législation liée au secteur de l’énergie pourraient avoir sur les investissements faits et sur les bénéfices escomptés par les investisseurs étrangers.
Des avocats d’affaires bien rodés à extorquer de l’argent public aux gouvernements au nom des « attentes légitimes des investisseurs étrangers » incitent ces derniers à avoir recours pour les règlements des différends aux tribunaux d’arbitrage privés, où siègent ces mêmes avocats, au lieu des tribunaux nationaux ; les deux options étant prévues par le TCE.
…Le dernier rapport du GIEC a identifié l’inclusion dans les traités commerciaux de dispositions permettant le recours aux tribunaux d’arbitrage privés comme une barrière à la mise en place des politiques de décarbonation qui imposent de mettre fin à l’exploration, l’exploitation et l’utilisation des énergies fossiles, y compris le gaz.
Or, en protégeant les investissements étrangers dans les énergies fossiles, le traité sur la Charte de l’énergie protège les actifs fossiles potentiellement « échoués » (« stranded assets », donc dévalorisés par l’évolution nécessaire de la législation). Le rapport du GIEC cite explicitement le traité sur la Charte de l’énergie comme un outil de blocage de l’action climatique par les propriétaires d’actifs fossiles potentiellement « échoués ». Ces derniers ont été estimés à 879 milliards d’euros fin 2019 et pourraient atteindre 2 150 milliards d’euros d’ici 2050 si la protection des investissements étrangers dans les énergies fossiles est maintenue.
Les investisseurs étrangers n’ont pas besoin d’attendre qu’une nouvelle loi soit votée. Il leur suffit d’invoquer le traité sur la Charte de l’énergie et de brandir la menace d’une demande de compensation devant les tribunaux d’arbitrage privés pour que les gouvernements abdiquent...