Q/A - Surveillance et torture en Egypte et en Libye – des dirigeants d’Amesys et Nexa Technologies mis en examen
Au cours de l’année 2011, en Tunisie d’abord, puis en Egypte, en Libye, au Yémen, au Bahreïn et en Syrie, les populations se sont soulevées contre des régimes autoritaires...pour faire entendre leurs exigences de justice sociale et de plus grand respect des libertés individuelles. Dans l’ensemble de ces pays, Internet a été l’un des principaux vecteurs de mobilisation populaire...les moyens de surveillance perfectionnés mis au service des régimes répressifs se sont révélés être des armes redoutables pour mieux cibler, arrêter et réprimer tous ceux qui se soulevaient de manière pacifique...
Les révélations parues dans les médias ont permis de mettre en lumière un commerce jusqu’ici très peu connu : celui des technologies de surveillance. Cette arme mise au service des régimes exerçant une répression aveugle à l’encontre de leur population est apparue aux yeux de la FIDH...comme posant la question essentielle de la responsabilité des entreprises qui se livraient à un tel commerce. Peut-on impunément vendre de tels matériels de surveillance à des régimes répressifs sans être jamais tenus responsables d’un tel commerce ? Dans quelle mesure la fourniture de programmes permettant aux services de renseignement de Mouammar Kadhafi ou, quelques années plus tard, au régime égyptien, de mieux réprimer les manifestants pacifiques ne s’apparente-t-elle pas à une complicité susceptible de revêtir une qualification pénale ? La question posée est aussi celle de la complicité des entreprises dans la commission de crimes internationaux, en l’espèce du crime de torture et de disparition forcée concernant l’Egypte.
Le 19 octobre 2011, la FIDH et la LDH ont décidé de porter plainte avec constitution de partie civile, pour des faits de complicité d’actes de torture, mettant en cause la société Amesys et ceux de ses cadres ou dirigeants qui auraient participé à la conclusion et la mise en œuvre de cet accord commercial conclu en 2007...
Cette plainte est fondée sur le principe de la compétence extraterritoriale des juridictions françaises, qui permet au juge français d’exercer sa compétence sur des crimes commis à l’étranger, indépendamment de la nationalité des auteurs ou des victimes, et ce en application de la Convention des Nations Unies contre la torture du 10 décembre 1984. En l’occurrence, la présence en France de la société Amesys, qui avait au moment des faits son siège social en France, justifiait la compétence de la justice française pour complicité du crime de torture, bien que ce crime ait été perpétré à l’étranger, par des étrangers en tant qu’auteurs principaux (les agents de l’Etat libyen ayant utilisé le matériel de surveillance fourni par Amesys, qui aurait agi en tant que complice) et à l’encontre de victimes libyennes...
...le 9 novembre 2017, faisant suite aux révélations...qui avaient mis en lumière l’existence d’un contrat conclu par Amesys – devenue Nexa Technologies – avec le régime égyptien, en 2014, la FIDH et la LDH...déposaient une dénonciation auprès du Pôle crimes contre l’humanité du Parquet de Paris, pour complicité de tortures et disparitions forcées...