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Article d'opinion

17 Jui 2015

Auteur:
Mauricio Lazala et Joe Bardwell, Centre de Ressources sur les Entreprises et les Droits de l'Homme, dans Open Global Rights

« Quels droits de l’homme ? » Pourquoi certaines entreprises s’expriment alors que d’autres non

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Initalement publié dans openGlobalRights.

Les entreprises sont nombreuses à s’exprimer sur les droits de l’homme quand leurs activités sont directement concernées, mais certaines d’entre-elles sont-t-elles prêtes à se positionner plus largement sur l’ensemble des questions relatives aux droits de l’homme ? EnglishEspañol

Suite aux fortes pressions exercées par les militants des droits de l’homme, et quelques jours seulement après l’annonce de sa nouvelle politique en matière de droits de l’homme, Formula One a approuvé l’organisation par l’Azerbaïdjan de son premier grand prix. Quand le directeur général de l’entreprise, Bernie Ecclestone, s’est vu demander s’il se pencherait sur le bilan du pays en matière de droits de l’homme, il a répondu, «  Nous l’avons fait. Je pense que tout le monde semble heureux. Il ne semble pas y avoir de gros problèmes. »

En dépit de l’image idéale peinte par Ecclestone, l’Azerbaïdjan présente en réalité un bilan désastreux dans le domaine des droits de l’homme et il est aujourd’hui en train de réprimer massivement sa société civile, comme Human Rights Watch et d’autres organisations l’ont rapporté. Ces actions ont été accompagnées par d’énormes campagnes de relations publiques visant à améliorer l’image du pays dans son ensemble. Alors que la nouvelle déclaration sur les droits de l’homme de Formula One remarque que l’entreprise « consulte de manière consciencieuse tous les acteurs concernés sur tous les problèmes soulevés lors de nos vérifications », ils n’ont, en pratique, pas changé leur manière de travailler.

Alors qu’une multitude d’exemples positifs d’entreprises s’exprimant en faveur des droits de l’homme existe, elles sont trop nombreuses à garder le silence lorsque les droits de l’homme sont en jeu dans des États répressifs, ou quand, dans un nombre de cas limités, leur activité va à l’encontre des intérêts de ces droits. Il est de plus en plus courant pour les grandes multinationales d’avoir des politiques publiques en matière de droits de l’homme qui se traduisent, pour un grand nombre d’entre elles, en actes tangibles visant à s’attaquer aux questions relatives aux droits de l’homme qui sont directement liées à leurs activités. Ces politiques incluent souvent un engagement à être très attentif aux droits de l’homme et à dialoguer avec les acteurs concernés. Mais quand certaines entreprises implantent ou maintiennent leurs activités dans des États répressifs, cet engagement public est régulièrement en contradiction avec leur inaction et leur silence.

Les entreprises ont tendance à percevoir les risques liés au ait de s’exprimer publiquement l’emporter sur les avantages. Plus grande est leur influence, plus grand est le risque, et plus grande est la réticence à s’exprimer. Par exemple, plus tôt cette année, Leber Jeweller, Inc., Tiffany & Co. et Brilliant Earth ont publié des déclarations appelant le gouvernement angolais à abandonner les poursuites contre Rafael Marques, un journaliste en procès pour diffamation pour avoir exposé les abus commis dans le secteur du diamant. Ils ont rejoint une multitude d’ONG faisant pression sur les autorités angolaises, mais aucune de ces entreprises n’avait d’activité en Angola. En fait, ITM Mining, qui a des activités en Angola, a maintenu sa plainte même après qu’un accord avec les autres parties semblait probable.

Même quand une entreprise possède une influence importante sur un gouvernement, elle peut être réticente à l’utiliser pour faire avancer les droits de l’homme. Même quand une entreprise possède une influence importante sur un gouvernement, elle peut être réticente à l’utiliser pour faire avancer les droits de l’homme. BP, par exemple, est le plus grand investisseur étranger en Azerbaïdjan et investit des milliards chaque année. Interpellé sur les problèmes dans le domaine des droits de l’homme et son parrainage des Jeux européens (qui auront lieu en Azerbaïdjan en juin 2015), BP a répondu qu’il « ne croit pas que chercher à influencer les politiques de gouvernements souverains puisse être considéré comme faisant partie de notre rôle en tant que sponsor des Jeux européens ». Bien sûr, comme l'a dit David Petrasek, BP chercherait certainement à « influencer les politiques de gouvernements souverains » quand les intérêts de l’entreprises sont en jeu.

Lorsque la protection des droits de l’homme se heurte aux intérêts économiques, même certaines entreprises qui sont fortement engagées en faveur des droits de l’homme font preuve d’indifférence à leur encontre. Plus tôt cette année, 31 entreprises suédoises ont rendu public une lettre soulignant leurs préoccupations concernant des déclarations de la ministre suédoise des affaires étrangères, Margot Wallström, critiquant le bilan de l’Arabie Saoudite dans le domaine des droits de l’homme. Les entreprises suédoises ont appelé à protéger les relations économiques au détriment des considérations pour les droits de l’homme.

Alors quand est-ce que les entreprises s’expriment ? Ne parlent-elles des droits de l’homme que lorsque cela rentre dans le cadre de leurs intérêts économiques ?

Dans le secteur de l’habillement, en janvier 2014, les entreprises s’approvisionnant au Cambodge, notamment Adidas, Columbia, Gap, H&M, Inditex, Levi Strauss et Puma, ont condamné le gouvernement pour sa répression violente des employés en grève dans le secteur de l’habillement ayant entraîné des morts et des blessés. En mars 2013, au Pérou, six entreprises textiles américaines ont exhorté le gouvernement péruvien à abroger une loi qui cautionnait les violations des droits du travail et leur posait des difficultés pour mettre en œuvre leur propre code de conduite en matière d’approvisionnement. Et en 2009, en réponse au coup d’État en Honduras, des grands fabricants de vêtements appelèrent à la restauration de la démocratie. Bien sûr, les préoccupations en matière de chaîne d’approvisionnement jouent un grand rôle dans ces affaires.

Dans le secteur des TIC, Google s’est retiré de Chine en 2010 en raison de tentatives de censure. Dans le secteur alimentaire, deux associations thaïlandaises de transformateurs de produits de la mer ont payé la caution pour le militant des droits, Andy Hall, qui a été emprisonné et accusé en 2014 à la suite de ses enquêtes sur les abus commis sur  les travailleurs immigrés dans l’industrie alimentaire en Thaïlande. En mars de cette année, 379 entreprises et organisations, dont des géants comme Coca-Cola, Goldman Sachs, Microsoft et Morgan Stanley, ont présenté une déclaration publique à la Cour Suprême des États-Unis en soutien au mariage entre personnes de même sexe. Et au cours des deux dernières années, des centaines d'entreprises ont publiquement exprimé leur soutien au processus de paix entre le gouvernement colombien et les combattants des FARC, alors que par le passé la plupart des entreprises en Colombie gardaient un profile bas pour ce qui touchait au conflit armé.

Plus récemment, la société civile a lancé un appel aux sponsors de la FIFA leur demandant de répondre aux préoccupations dans le domaine des droits de l’homme s’agissant de la construction des sites pour la coupe du monde au Qatar en 2022. Jusqu’à présent, Adidas, Coca-Cola et Visa ont publié des déclarations en faveur des droits des travailleurs dans le pays.

S’exprimer contre les violations est juste. Mais la « justification commerciale » n’est pas trop difficile à établir lorsqu’il s’agit de soutenir un espace civique ouvert et tolérant. Les entreprises  tirent clairement bénéfice quand les règles du jeu sont claires, les consommateurs autonomisés, les employés respectés et quand le système judiciaire fonctionne bien. Là où les droits de l’homme se portent bien et que les défenseurs sont protégés, les entreprises vont également plus facilement se conformer avec leur propre code de conduite et satisfaire leur engagement public en faveur des droits de l’homme.

S’exprimer en faveur des droits de l’homme peut même aider les entreprises. Des sociétés aux États-Unis sont en train de découvrir que le fait de prendre des positions publiques éclairées sur les questions de justice sociale n’a pas été dommageable à leurs résultats financiers et favorise les affaires en aidant à attirer et garder de nouveaux consommateurs ainsi que les employés les plus performants. Les investisseurs se penchent également de plus en plus sur le bilan social et environnemental des entreprises. Les sociétés, ayant besoin d’avoir accès aux banques multilatérales et aux agences de crédit à l’export, doivent se conformer avec des normes internationales strictes. Et parfois les entreprises ne veulent simplement pas la publicité négative qui vient avec le fait d’être associé à un gouvernement répressif.

Les entreprises peuvent être un interlocuteur très important dans la protection des populations vulnérables dans les pays répressifs, en particulier là où les violations qui ont lieu sont en lien avec leur secteur d’activité et quand de grands investisseurs sont présents. Elles sont malheureusement nombreuses à rester réticentes lorsqu’il s’agit de s’exprimer en faveur des droits de l’homme, en particulier quand elles pensent que cela pourrait leur nuire financièrement. Cependant, un certain nombre d’entreprises courageuses aident à créer et renforcer un « environnement propice » aux droits de l’homme. Peut-être peuvent-elles définir une nouvelle tendance pour les entreprises en s’exprimant pour protéger l’espace civique.